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Lettre ouverte - Budget 2021 : avoir les moyens d’enseigner au cégep et à l’université

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16 févr. 2021 03:05

La pandémie a révélé à quel point le secteur de l’enseignement supérieur est au cœur de l’avancement de la société québécoise. Chaque année, les cégeps, collèges et universités remettent des dizaines de milliers de diplômes à de jeunes adultes, à des travailleuses et travailleurs en formation continue, à des citoyennes et citoyens qui ont des ambitions personnelles et professionnelles qui façonneront la société de demain.

Ce «demain» sera sans doute marqué par une difficile sortie de crise sanitaire et une mutation du marché du travail pouvant exacerber la pénurie de main-d’œuvre dans certains secteurs d’activité.

Ce «demain» exigera assurément un appui renforcé et des investissements gouvernementaux pour soutenir le dynamisme et la vitalité de nos régions.

Dans les régions de Québec et de Chaudière-Appalaches, les cégeps, collèges et universités contribuent à ce dynamisme, de Charlevoix jusqu’en Beauce, en permettant à plusieurs dizaines de milliers d’étudiantes et d’étudiants de fréquenter des institutions d’enseignement dans leur région et de contribuer à leur vitalité. Tant socialement qu’économiquement, l’enseignement supérieur fait donc partie de la solution pour développer une société post-pandémie résiliente et prospère.

Des défis majeurs à relever pour soutenir la réussite étudiante

Malgré le contexte sanitaire exigeant et en dépit des conditions difficiles qui ont considérablement alourdi, depuis mars 2020, le travail des personnes chargées de cours ainsi que des professeur-es, nous avons continué, au meilleur de notre engagement, à former les étudiantes et étudiants du collégial et de l’université, qui deviendront ces futures enseignantes, techniciens en informatique, infirmières, intervenantes en petite enfance, dentistes, administrateurs, spécialistes en lettres et cinéma, techniciennes et techniciens en laboratoire, policiers et bien d’autres, dont la société aura un grand besoin.

Mais nous sommes inquiets. À la sortie de cette crise sanitaire, jamais les défis n’auront-ils été aussi importants à relever en enseignement supérieur.

Éprouvée sur tous les plans par les impacts de la pandémie, la motivation des étudiantes et des étudiants est au plus bas. Persévéreront-ils dans la réalisation de leurs projets d’étude ? Durement touchés par un enseignement 100 % en ligne et sans contact avec leurs pairs, plusieurs songent ou ont abandonné leurs projets de formation. Les modalités d’enseignement en mode non présentiel et les accès différenciés aux technologies ont aussi pu contribuer à exacerber les inégalités, susceptibles de creuser un fossé durable dans l’accès aux études collégiales et universitaires et compromettre la réussite éducative.

Aussi, comme l’a montré tout récemment une étude réalisée par l’Union étudiante du Québec/l’UEQ, le fléau de la détresse psychologique est bien réel. Ce problème, amplifié par la crise sanitaire, n’est pas nouveau : un article révélait en effet en novembre 2019, avant la pandémie, que 58 % des étudiantes et étudiants universitaires éprouvaient des problèmes de santé mentale. Au collégial, la situation est également inquiétante selon une étude récente, qui révèle que les besoins d’aide psychologique, déjà importants, se sont accrus. À cela s’ajoutent les transitions technopédagogiques qui bousculent les relations enseignants-étudiants et l’augmentation croissante du nombre d’étudiants qui ont des besoins particuliers en soutien à leur réussite et dont l’encadrement est beaucoup plus individualisé et exigeant.

C’est un secret de polichinelle que d’affirmer que le cumul de ces situations a bouleversé le travail du corps enseignant, et ce, depuis plusieurs années. Cette capacité à agir et à soutenir le bien-être et la réussite de nos étudiantes et étudiants, qui demeure une préoccupation centrale pour nous tous et nous toutes, est toutefois tributaire des moyens dont nous disposons. La qualité de la formation doit s’appuyer sur des conditions d’enseignement soutenables.

Budget 2021 : des acteurs syndicaux de l’enseignement supérieur exigent un financement accru

Des décisions budgétaires historiques seront prises prochainement. Quelles seront les décisions du gouvernement Legault ?

Nous avons vu, avec le secteur des soins aux aîné-es, que le sous-investissement chronique dans des secteurs-clés de la société engendre à long terme des effets négatifs durables. Si l’envie du retour à l’équilibre budgétaire pourrait être tentant, rappelons-nous que l’austérité peut causer, et a causé encore tout récemment, des préjudices sociaux et humains importants.

Ce n’est pas ce que nous voulons pour nos jeunes et moins jeunes qui accomplissent des études collégiales et universitaires. Or, la qualité des diplômes et la réussite étudiante dépendent d’un financement adéquat. L’enseignement supérieur a subi trop de compressions depuis de nombreuses années pour que le gouvernement omette d’y injecter des sommes supplémentaires dans le prochain budget.

Cet investissement doit viser la relation pédagogique centrée sur l’apprenant. L’argent investi dans les infrastructures et dans les outils technologiques ne contribue pas à enrichir cette relation pédagogique incontournable. La force de ce secteur repose sur ses enseignantes et enseignants et il est urgent de mieux soutenir le travail des personnes professeures et chargées de cours des cégeps et des universités.

Investir en éducation, ça demeure et ça demeurera toujours un gain collectif.

Lettre ouverte signée par neuf syndicats en enseignement supérieur affiliés à la Fédération nationale des enseignantes et enseignants du Québec (FNEEQ-CSN) de la région de Québec–­Chaudière-Appalaches qui représentent, au total, un peu plus de 4000 personnes enseignantes des cégeps et des universités.

Christine Gauthier, présidente, Syndicat des chargées et chargés de cours de l’Université Laval
Robin Cormier, président, Syndicat des professeures et professeurs du Cégep Limoilou
Geneviève Ribordy, présidente, Champlain St. Lawrence College Teachers’ Union
Frédéric Dufour, président, Syndicat des enseignants et enseignantes du Cégep Beauce-Appalaches
Pascal Binet, président, Syndicat des enseignantes et des enseignants du Cégep de Thetford
Louise Bérubé, présidente, Syndicat des chargés et chargées de cours de l’UQAR
Nathalie Ebnoether, présidente, Syndicat des tuteurs et tutrices de la Télé-Université
Jean Francis Matteau, président, Syndicat des professeur-e-s du Collège François-Xavier-Garneau
David Lachance, président, Syndicat du personnel enseignant du Centre d’études collégiales dans Charlevoix
Denise Turcotte, Syndicat des professeures et professeurs du Cégep de Lévis-Lauzon

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