Dans une chronique publiée dans le Wall Street Journal du 30 avril dernier, la chroniqueuse américaine Peggy Noonan constate qu'il n'est pas facile d'analyser les conséquences de la pandémie de grippe espagnole de 1918. Qu'en est-il pour Lévis?
Par Claude Genest - Ancien président de la Société d’histoire de Lévis
Comme nous l'avons vu à l'occasion de deux précédents articles parus les 29 mars (Lévis et la grippe espagnole en octobre 1918) et 5 avril (La grippe espagnole et les autres épidémies à Lévis) la pandémie fut fulgurante à Lévis avec de nombreux morts.
Dans ses Dates Lévisiennes, Pierre-Georges Roy mentionne que le 2 octobre 1918 il n'y a aucun cas de grippe espagnole à Lévis. Dix jours plus tard, la pandémie se répand à la vitesse de l'éclair. Si bien que le 23 octobre, on compte 51 morts et 2 484 personnes touchées sur une population de 10 057 habitants. C'est énorme, soit le quart de la population infectée en trois semaines.
Ce qui intrigue par rapport à la crise actuelle est la rapidité de la contagion et la relative brièveté de la période de confinement intensif. Les écoles lévisiennes et d’autres établissements ferment le 12 octobre, à la suite d'un avis du maire Noël Belleau, le 14 octobre, on décide de mettre sur pied un hôpital temporaire et le lundi 21 octobre, le quotidien l'Action Catholique à Québec déplore un premier dimanche sans messe à Lévis la veille.
Toutefois, dès le 22 octobre, on assiste à un déconfinement, sans utiliser ce mot, progressif. Toujours selon Pierre-Georges Roy, les magasins de détail et de gros peuvent ouvrir alors que restaurants, hôtels, billard et cinémas restent fermés. Quant aux laitiers et épiciers, ils n'ont le droit qu'à la livraison à la porte seulement. De son côté, le Bureau provincial d'hygiène «prie instamment tous les citoyens de continuer à prendre les mesures de précautions déjà prescrites», notamment de désinfecter les maisons.
Le retour progressif de certaines activités apparaît plutôt rapide compte tenu du nombre impressionnant de personnes malades et Pierre-George Roy ne revient pas sur la crise dans les mois qui suivent.
Comme le suggère Peggy Noonan, les gens de cette époque étaient habitués à la mort et à la précarité de la vie humaine après quatre ans de guerre meurtrière en Europe et avec un taux de mortalité infantile beaucoup plus élevé qu'aujourd'hui ce qui pose indirectement la question de notre réaction face à la crise actuelle. L’histoire un jour nous le dira, car la crise de la COVID-19 est présentement abondamment analysée.