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Le décès d’Hugo St-Onge aurait été «possiblement évitable»

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CRÉDIT : ALEXANDRE BELLEMARE

30 juil. 2020 03:43

Hugo St-Onge est cet ambulancier lévisien de 24 ans qui est décédé le 27 décembre 2017 d’un arrêt cardiorespiratoire. Les secours avaient pris 17 minutes avant d’arriver sur les lieux, ce dernier a perdu la vie durant cette même nuit. La coroner Julie Langlois a dévoilé son rapport et ses recommandations, le 30 juillet dernier.

Rappelons les faits. Hugo St-Onge, qui travaillait comme paramédic chez Dessercom, était arrivé chez sa conjointe vers minuit. Il s’est allongé sur le lit et a été pris de convulsions pendant quelques secondes. Sa conjointe a alors fait un appel au 911 à 0h31. Alors qu’elle était au téléphone, le Lévisien a cessé de respirer. Les services d’urgence lui ont demandé de commencer les manœuvres de réanimation.

C’est 17 minutes plus tard que les premiers répondants, les pompiers de Breakeyville, sont arrivés sur place et quatre minutes plus tard, les ambulanciers. Hugo St-Onge a été transporté au CHUL, où on constatera son décès, après plusieurs tentatives pour le sauver, à 2h01.

«Pour moi, il est clairement possible que le manque d’effectif ambulancier ait joué un rôle important dans le sort de M. St-Onge ce soir-là», a analysé Me Langlois. En effet, dans la nuit du 27 décembre, seulement trois ambulances étaient en service et chacune d’entre elles était occupée. C’est alors qu’une demande a été faite du côté des paramédics du territoire de Saint-Charles-de-Bellechasse.

C’est aussi ce qui a ralenti l’arrivée des premiers répondants puisqu’à l’époque, la Centrale des Appels d’Urgence Chaudière-Appalaches (CAUCA) devait attendre avant d’appeler les premiers répondants qu’un transport ambulancier soit affecté. Ce sont cinq minutes qui se sont écoulées avant de trouver une ambulance disponible pour ensuite appeler les pompiers de Breakeyville, qui étaient pourtant disponibles dès le début des événements.

«Les normes nord-américaines préconisent un délai d’intervention de 8 à 10 minutes dans un cas d’arrêt cardiorespiratoire. Au-delà de 15 minutes, les chances de survies sont pratiquement nulles», a constaté la coroner.

Un souffle au cœur

Hugo St-Onge qui était un passionné, sportif et dévoué à son travail ainsi qu’à sa communauté, selon les dires de sa mère, avait dû passer un échocardiogramme en juin 2016 à la suite d’une syncope survenue deux mois auparavant.

Il avait ensuite rencontré un cardiologue à l’Hôpital Saint-François d’Assise, le 2 décembre 2016, qui en était arrivé à la même conclusion que celle des tests passés en juin, ce dernier était aux prises d’«un léger prolapsus du feuillet antérieur de la valve mitrale et à une insuffisance mitrale légère». Pour conclure ce rendez-vous, le cardiologue a recommandé d’éviter la déshydratation et qu’un suivi était prévu aux trois ans.

Les recommandations

Au terme de son rapport, la coroner a énoncé quatre recommandations. Tout d’abord, elle demande au CHU de Québec de réviser ses façons de faire concernant le suivi qui a été proposé à Hugo St-Onge, le 2 décembre 2016.

Ensuite, elle demande aux instances gouvernementales de se concerter afin d’examiner la problématique des effectifs ambulanciers sur le territoire lévisien. Aussi, que les employés assignés aux appels de la CAUCA insistent pour qu’une procédure optimale soit suivie dans le cas d’une réanimation cardiorespiratoire.

Puis, elle demande au Centre intégré de santé et de services sociaux de Chaudière-Appalaches, à la CAUCA et à Dessercom de poursuivre des démarches d’arrimage avec le système de répartition assisté par ordinateur véhiculaire ainsi que d’équiper les paramédics de téléphones avec puce permettant le repérage des véhicules ambulanciers rapidement par la centrale.

«Chaque événement pris isolément est en soi une piste de réflexion pour les intervenants de première ligne ou encore les services préhospitaliers. Toutefois, pour la famille, j’ose dire que c’est une cascade de rendez-vous ratés», a déploré Me Langlois.

«Arrêter d’accepter le statu quo»

Depuis cette nuit de décembre 2017, seulement une nouvelle ambulance a été mise en service sur le territoire lévisien, une situation difficile depuis plusieurs années pour les ambulanciers. Notons d’ailleurs qu’Hugo St-Onge avait signé une lettre ouverte qui déplorait le manque d’effectif ambulancier dans la région, un mois avant sa mort.

«(Cette situation) va motiver la famille à prendre contact avec les intervenants qui prennent ces décisions-là. On va aller plaider la cause d’Hugo et on va s’assurer que les mesures sont mises en place et que c’est fait dans un délai raisonnable. Ça ne ramènera pas notre garçon, on fait ça pour éviter que quelqu’un d’autre passe par ce qu’on a passé», a argué la mère du défunt, Johanne Lapointe.

De son côté, Maxime Laviolette, directeur général de Dessercom, était outré que les choses n’aient presque pas bougé depuis bientôt trois ans. «Il faut arrêter d’accepter le statu quo […] c’est une mort qui aurait pu être évitée, il faut prendre les moyens pour corriger ces problèmes-là, a-t-il exprimé émotivement. Je suis tanné du statu quo et des gens qui disent que ce ne sont que des statistiques, la vie humaine n’est pas une statistique.»

Pour le moment, seulement l’équivalent de huit ambulances est en service sur le territoire lévisien tandis que dans les villes comparables, ce sont 12 à 14 ambulances qui sont sur le terrain, a souligné M. Laviolette.

«Quel paradoxe, celui qui sauvait des vies n’a pas réussi à être sauvé», a tristement exposé Me Langlois qui en conclut que cette mort naturelle aurait possiblement été évitable.

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