lundi 3 février 2025
Votre Journal. Votre allié local.
APES

Manque criant de pharmaciens dans les urgences de la Chaudière-Appalaches

Les + lus

Photo : Unsplash - Tamanna Rumee

31 janv. 2025 11:00

89 % des besoins en pharmaciens sont non comblés dans les urgences de la Chaudière-Appalaches, affirme l’Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec (APES) dans sa dernière enquête dont les résultats ont été dévoilés, le 31 janvier. L’association déplore que le gouvernement n’ait toujours pas octroyé de mandat de négociation bien que l’entente de travail avec ses membres soit échue depuis deux ans.

La pénurie de main-d’œuvre qui frappe le domaine de la santé depuis plus de 20 ans et les conditions alléchantes du secteur privé sont en partie responsables de la situation.

«Présentement, 80 % des pharmaciens se retrouvent dans le secteur privé. Les pharmacies ont aussi un besoin de main-d’œuvre, mais elles peuvent ajuster leurs conditions de travail pour attirer les jeunes, explique Linda Vaillant, directrice générale de l’APES. On doit compétitionner avec le secteur privé, mais on est à la remorque pour attirer les jeunes vers une pratique hospitalière.»

Afin de travailler dans le milieu hospitalier, les pharmaciens doivent compléter une maîtrise à la suite de leurs études en pharmacie. Linda Vaillant explique que bien que les étudiants reçoivent une bourse pour leurs deux années d’études, les conditions dans le secteur privé rendent difficile le recrutement vers le milieu hospitalier.

«On travaille très fort pour vendre la pratique comme telle, mais on ne réussit pas assez. On a 120 places disponibles à la maîtrise en pharmacothérapie avancée et, cette année, on a 89 personnes inscrites. En plus, c’est une bonne année, ajoute-t-elle. C’est gratifiant de travailler dans les hôpitaux, mais ce n’est pas connu ni valorisé.»

La valorisation de la profession est au cœur de la solution, mais l’APES ne sent pas que c’est une priorité pour le gouvernement du Québec.

«Le ministère de la Santé, c’est l’employeur. À mon avis, ça revient à l’employeur de faire connaître ses besoins en emploi. Je trouve que ce rôle n’est pas très bien joué de la part du ministère de la Santé, puisqu’il est bien au fait des difficultés qu’on vit. On n’a jamais entendu le ministre Christian Dubé dire qu’on a besoin de pharmaciens dans les salles d’urgence», mentionne la directrice générale de l’APES.

Refus de négocier

L’entente de travail des pharmaciens en milieu hospitalier est échue depuis deux ans, mais les négociations n’ont toujours pas débuté. L’inaction du gouvernement est incompréhensible pour l’APES.

«C’est habituel de négocier après la fin d’une entente pour nous, mais on nous a demandé de déposer nos demandes il y a environ un an, ce qu’on a fait, en nous disant qu’on s’occuperait bientôt du dossier. Les demandes ont été déposées, mais l’équipe de négociation nous a dit qu’elle n’a toujours pas de mandat de s’entendre avec nous. Nous avons plusieurs solutions pour aider à mieux organiser les choses dans le réseau de la santé, mais il faut toujours bien être assis devant quelqu’un qui veut nous entendre», clame Mme Vaillant.

D’ailleurs, ces propositions sont loin d’être des demandes syndicales, selon la directrice générale de l’APES. Elles serviraient plutôt à régler le manque de pharmaciens dans les hôpitaux, particulièrement dans les régions.

«Plus on s’éloigne, plus il y a de problèmes. Dans la Chaudière-Appalaches, on n’est pas si loin de Québec, mais il manque 89 % de personnel dans les urgences. On est proche de la rupture de service, indique Linda Vaillant. Parmi ce qu’on propose, on souhaite mettre en place des corridors de services pour que les établissements mieux nantis puissent prêter des pharmaciens en région en continu. On est loin d’une demande typiquement syndicale, on veut régler le problème.»

Une autre solution proposée par l’APES vise à emmener les jeunes vers le secteur hospitalier en rivalisant avec les conditions du privé.

«On propose aussi que les étudiants à la maîtrise soient déjà considérés comme des salariés. Ils auraient un salaire inférieur aux pharmaciens qualifiés, mais au moins ils accumuleraient de l’ancienneté, ils cotiseraient à leur fonds de pension et ils profiteraient des assurances collectives du réseau. Ce ne sont pas des choses si importantes pour le gouvernement, mais ce serait plus attrayant pour les jeunes», affirme Mme Vaillant.

La grogne se fait sentir auprès des membres de l’APES et de solutions seront envisagées pour que leurs demandes soient entendues.

«On a eu une assemblée générale le 11 décembre dernier où on faisait état de la situation et les membres nous ont demandé de mettre en place un plan d’action avec une date butoir. On va déployer des actions qui seront annoncées au moment opportun et qui vont graduellement augmenter la pression pour qu’on soit entendus», précise-t-elle.

Le désir de l’organisation n’est pas de se rendre à des moyens de pression, mais plutôt d’être écoutée.

«Ce serait aberrant de se rendre jusque-là, parce qu’on demande seulement de s’asseoir pour discuter. J’espère que le gros bon sens va régner et qu’ils vont nous écouter. Je n’ai jamais vu ça, des mesures de pression simplement pour que le gouvernement accepte de venir nous parler», dénonce la directrice générale de l’APES.

Les + lus