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Lettre ouverte

Recommandations pour le budget 2024 en faveur d'un soutien immédiat à l'industrie de la radio locale canadienne

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Photo : Jonathan Velasquez - Unsplash

27 févr. 2024 08:49

Chers ministres fédérales des Finances et du Patrimoine canadien, À l'approche de l'élaboration du budget 2024, les entreprises signataires, toutes indépendantes et non liées aux grands conglomérats des communications, soumettent une série de propositions pour assister le secteur des radios locales canadiennes, faisant face à des défis importants.

Note de la rédaction : Le Journal de Lévis n'endosse aucune opinion qui est partagée dans les lettres d'opinion ou ouvertes publiées dans notre section Opinions. Les opinions qui sont exprimées dans ce texte sont celles des auteurs signataires.

L'état actuel du secteur de la radio au Canada

 L'industrie radiophonique au Canada, établie depuis plus de cent ans, fait face à d'importants défis financiers dus à l'émergence de nouveaux concurrents et aux progrès technologiques. Malgré ces défis, la radio demeure essentielle pour des millions de Canadiens répartis dans des communautés de toutes tailles, d'un bout à l'autre du pays.

Les stations de radio locales jouent un rôle essentiel : elles informent et divertissent les auditeurs, tout en étant le vecteur principal pour la diffusion de la musique canadienne. Elles jouent également un rôle clé dans la démocratie en offrant aux représentants locaux un moyen de rejoindre directement les communautés. La radio se révèle être un outil indispensable pour diffuser des informations vitales, y compris les conditions de circulation et les prévisions météorologiques.

Son importance est encore plus marquée lors de crises telles que les catastrophes naturelles notamment les tempêtes, inondations et incend ies de forêt qui ont un impact profond sur les citoyens. L e gouvernement canadien recommande même l'inclusion d'une radio à manivelle ou fonctionnant sur piles dans les trousses de secours de base. De plus, son utilisation ne coûte rien.

Au cours de la dernière décennie, le secteur de la radio, comme une grande partie de l'industrie de la radiodiffusion canadienne, a subi une période de changement structurel. L'émergence de services de musique en continu comme Spotify et Apple Music, généralement disponibles moyennant un abonnement mensuel, a considérablement fragmenté les audiences sur le marché audio canadien.

Parallèlement, la publicité a progressivement quitté les médias traditionnels pour se concentrer sur les géants du web comme Google et Meta. Il y a moins de vingt ans, la publicité en ligne ne comptait que pour environ 6 % du marché publicitaire total. Aujourd'hui, elle représente près de 70 %, atteignant environ 12 G$.

Les stations de radio exploitées par la Société Radio-Canada sont à l'abri de ces tendances, car elles ne dépendent pas des revenus publicitaires, étant financées par les crédits parlementaires alloués au service public de diffusion. En revanche, la radio privée, qui repose entièrement sur la publicité pour son financement, a subi de plein fouet les répercussions de ces changements. En 2013, le secteur de la radio privée canadienne générait 1,604 G$ de recettes publicitaires.

Ce chiffre a chuté à 1,429 G$ en 2019. La pandémie de COVID-19 a ensuite porté un coup sévère à l'industrie, avec des entreprises réduisant drastiquement leurs budgets publicitaires. En 2021, les revenus ont plongé de plus de 400 M$, tombant à 1,021 G$. Bien que les revenus aient légèrement rebondi depuis 2021, ils demeurent nettement inférieurs aux niveaux prépandémiques et il est peu probable qu'ils atteignent de nouveau ces sommets.

Pour préserver la qualité de ses services malgré une conjoncture difficile, l'industrie radiophonique a cherché à réduire ses coûts autant que possible. Toutefois, la rentabilité du secteur a considérablement diminué. En 2019, le bénéfice avant intérêts et impôts (BAII) pour la radio privée s'élevait à 17,1 %. D'après les dernières données disponibles de 2022, ce taux a chuté à seulement 5,4 %.

Dans une période marquée par les difficultés financières de l'industrie radiophonique, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) a révisé sa politique sur la radio commerciale à la fin de l'année 2022, la première révision d'envergure en 14 ans. Le Conseil a estimé qu'il y avait peu de nécessité de modifier ses réglementations existantes.

Par conséquent, le CRTC continue d'appliquer des règles conçues en 1998, avant l'émergence des services de musique en continu et des téléphones intelligents, en les considérant toujours adaptées malgré les menaces significatives auxquelles l'industrie doit faire face.

De plus, à la suite de l'adoption du projet de loi C 11, le Conseil, le tribunal administratif quasi judiciaire chargé de superviser les industries de la radiodiffusion et des télécommunications au Canada, a déclaré qu'il reporterait l'examen de toutes les demandes ou plaintes concernant les entreprises de radio pendant deux ans en raison de l'analyse en cours sur l'application de la nouvelle Loi sur la diffusion continue en ligne.

Bon nombre de ces demandes sont d'ordre technique et essentielles pour améliorer à la fois les performances d'une station donnée et le service qu'elle fournit à ses auditeurs. Le Conseil n'a pas limité les demandes pour tout autre type d'entreprise de radiodiffusion.

L'industrie radiophonique ne peut se permettre d'attendre passivement que le Conseil termine son processus de révision réglementaire, qui s'étend sur plusieurs années. Les discussions actuelles du Conseil se concentrent principalement sur l'obligation pour les plateformes de diffusion continue en ligne à participer au financement de la communauté créative.

Bien que les entreprises reconnaissent et appuient les efforts du Conseil dans ce domaine, ces mesures ne vont pas améliorer la situation financière actuelle ou future de la radio. Pour que l'industrie de la radiodiffusion, et la radio en particulier, puisse continuer à servir l'intérêt public, elle doit être économiquement viable. Actuellement, ce n'est pas le cas, et les opérateurs de radio ont été forcés de prendre des mesures difficiles, telles que des licenciements, pour maintenir leur activité.

Recommandations pour le budget 2024

 Pendant la pandémie de COVID-19, le gouvernement a pris des mesures pour soutenir les entreprises canadiennes, y compris celles du secteur radiophonique. Les entreprises expriment leur gratitude pour cette aide et ne la considèrent pas comme acquise. Néanmoins, les stations de radio du pays traversent une période critique.

Bien que nous accueillerions l'opportunité de discuter des défis auxquels le secteur est confronté, y compris la révision des politiques radio du Conseil, avec la ministre du Patrimoine canadien et son équipe , il y a ces actions suivantes que le gouvernement pourrait entreprendre de manière plus immédiate dans le prochain budget pour aider l’industrie :

- Dédier 70 pour cent des dépenses publicitaires du gouvernement du Canada de manière équitable parmi les médias locaux canadiens, incluant la radio locale, la télévision, la presse écrite et les médias numériques:

- Mettre en place un crédit d'impôt minimal de 20 % pour encourager les annonceurs à privilégier l'achat d'espaces publicitaires auprès des médias canadiens, tant dans la presse écrite que dans la radiodiffusion.

Chacune de ces propositions est discutée en détail ci dessous.

Dépenses publicitaires du gouvernement

En 2021 22, le gouvernement du Canada a investi près de 141 M$ en publicité, ce qui en fait l'un des principaux annonceurs du pays. Toutefois, une grande partie de ce budget a récemment été allouée à des campagnes en ligne, bénéficiant sur tout aux géants du Web, tels que Google et Meta.

Dans un contexte où les médias locaux canadiens rencontrent des difficultés, il serait judicieux pour le gouvernement de privilégier les entreprises de médias nationales pour ses achats publicitaires. Les médias locaux bénéficient d'une audience étendue et la publicité diffusée sur ces canaux a souvent un impact plus marqué.

Par exemple, un message publicitaire diffusé le matin sur une station de radio locale peut s'avérer bien plus efficace qu'une vidéo publicitaire sur le Web que les utilisateurs ont tendance à ignorer. Pour ces raisons, les entreprises demandent qu'à l'avenir, le gouvernement alloue équitablement 70 % de son budget publicitaire aux médias locaux du pays, répartissant cet investissement entre la radio locale, la télévision, la presse écrite et les plateformes numériques détenues par des Canadiens.

Mise en place de crédits d'impôt incitatifs pour les investissements publicitaires dans les médias imprimés et radiophoniques canadiens

 Comme indiqué précédemment, les publicités en ligne constituent aujourd'hui environ 70 % de l'ensemble du marché publicitaire. La majorité de ces dépenses publicitaires est dirigée vers deux géants internationaux, Google et Meta, qui occupent une position dominante dans l'univers de la publicité numérique. Des décennies avant le développement de l'Internet, le gouvernement canadien a établi des politiques pour encourager les entreprises du pays à privilégier la publicité dans les médias canadiens.

Plus précisément, l'article 19.1 de la Loi de l'impôt sur le revenu a été introduit pour dissuader les annonceurs d'acheter du temps publicitaire auprès de diffuseurs américains situés près de la frontière canadienne, dont les signaux pouvaient être captés dans les villes du sud du Canada. L'article 19.1 empêchait les entreprises de déduire la publicité comme une dépense d'entreprise si elle était achetée sur des médias étrangers.

Une approche simplifiée qui pourrait être adaptée au paysage médiatique actuel consisterait à offrir aux entreprises canadiennes un crédit d'impôt de 20 % sur leurs dépenses publicitaires si elles choisissent de les investir dans les médias imprimés et de radiodiffusion canadiens.

Les crédits d'impôt sont fréquemment utilisés par les gouvernements pour stimuler les dépenses dans des secteurs ciblés, comme les incitations fiscales pour les voyages durant la pandémie ou pour des travaux de rénovation résidentielle. Une telle mesure servirait à valoriser et récompenser l'engagement des entreprises canadiennes envers les médias nationaux, un secteur essentiel pour le pays.

Ces propositions sont conçues pour être mises en place rapidement et gérées de manière simple, sans imposer de charges fiscales supplémentaires aux citoyens canadiens. Les Canadiens, d'un océan à l'autre, se réjouiront de voir leur gouvernement prendre des mesures rapides et réfléchies pour soutenir la pérennité des animateurs radio de confiance, qui leur fournissent des informations et du divertissement en temps réel.

De plus, ces services continueront d'être offerts gratuitement aux auditeurs de radio. Les entreprises vous remercient sincèrement pour l'opportunité de soumettre ces recommandations.  

Ian Lurie, président de Stingray Radio

Chris Pearson. président d'Acadia Broadcasting Limited

Sylvain Chamberland, président d'Arsenal Media

Kevin Brown, directeur général de Bayshore Broadcasting

Ron Dann, président de Blackburn Media

Chris Byrnes, président de Byrnes Communications

Doug Bingley, président de Central Ontario Broadcasting

Hector Dougall, président de Dougall Media

Douglas Kirk, président de Durham Radio

Paul Evanov, président d'Evanov Communications

Christopher Grossman, président de Local Radio Labs

David Pace, directeur des opérations de MBS Radio

Rod Schween, président de Pattison Media

Bill Morton, président de Quinte Broadcasting

Gord Rawlinson, chef de la direction de Rawlco Radio

John Sherratt, président de Starboard Communications

Ed Torres, président de Torres Media

Bryan Edwards, président de Vista Radio

Matt Caine, président de Whiteoaks Communications Group

Elmer Hildebrand, président et chef de la direction de Golden West Broadcasting

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