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Lettre ouverte

Québec doit profiter de son budget pour corriger les iniquités d’accès aux garderies qui désavantagent les femmes québécoises

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Photo : Archives - Gilles Boutin

04 mars 2024 02:20

En annonçant son intention de se tourner vers le plus haut tribunal du pays pour contester la décision de la Cour d’appel permettant aux demandeurs d’asile d’envoyer leurs enfants en garderies subventionnées, le gouvernement fait fausse route en maintenant un accès discriminatoire envers les femmes au système d’éducation à la petite enfance.

Note de la rédaction : Le Journal de Lévis n'endosse aucune opinion qui est partagée dans les lettres d'opinion ou ouvertes publiées dans notre section Opinions. Les opinions qui sont exprimées dans ce texte sont celles des auteurs signataires.

Celui-ci aurait plutôt avantage à écouter le jugement d’appel et profiter de son budget 2024-2025 pour mettre fin à des années d’iniquités dans le financement du réseau de la petite enfance. Il est important de noter qu’aller en appel de cette décision irait à l’encontre des intérêts de l’ensemble des femmes du Québec, et non seulement les demanderesses d’asile, puisqu’elles aussi vivent une situation d’exclusion du système.

Rappelons que le 7 février dernier, la Cour d’appel du Québec a confirmé le droit des demandeurs d’asile à envoyer leurs enfants dans des garderies subventionnées et des CPE. Au Québec, le gouvernement subventionne certaines garderies, ce qui leur permet notamment d’offrir des places aux parents à une fraction du prix habituel.

Aux yeux de la Cour d’appel, interdire à la demanderesse qui est demandeuse d’asile d’envoyer son enfant dans une garderie subventionnée ou un CPE — et ainsi n’avoir qu’à débourser qu’une somme raisonnable pour sa garde — constitue «une discrimination fondée sur le sexe».

En effet, cela peut avoir comme conséquence d’empêcher une personne de travailler, par manque de moyens financiers pour s’acquitter des frais de garderie non subventionnée, par exemple. L’enfant qui ne fréquentera pas un service de garde subventionné pourrait aussi en ressentir des impacts sur son développement. Dans cette situation, selon la juge, le préjudice subi par la femme et ses enfants serait trop important pour être considéré comme raisonnable.

Ce jugement nous confronte enfin au fait que cette situation s’applique également — à quelques différences près — à de nombreuses femmes québécoises qui attendent depuis trop longtemps pour une place en garderie subventionnée.

Pourtant, des solutions existent. Le gouvernement doit appuyer sur l’accélérateur et convertir davantage de garderies actuellement non subventionnées en garderies subventionnées et financer adéquatement le développement des nouvelles garderies subventionnées en tenant compte de l’augmentation considérable des coûts de construction et de l’utilisation des locaux. Depuis trois ans, 9 000 places ont été converties. Considérant que le gouvernement fédéral paie une bonne partie de la facture, ne pas convertir un plus grand nombre de places en 2024 relève d’un non-sens qui se doit d’être corrigé au plus vite.

Québec se doit de faire preuve de volonté pour aider la cause des femmes. Il est aberrant de penser qu’encore aujourd’hui, des femmes doivent se priver de travailler faute de places en garderie à contribution réduite.

Justement, alors que le budget 2024-2025 du Québec sera déposé la semaine prochaine, nous enjoignons au gouvernement à corriger les flagrantes iniquités de financement du réseau de la petite enfance pour que toutes les femmes puissent enfin avoir accès à des places subventionnées de qualité.

Cela doit se concrétiser par l’octroi d’un financement suffisant pour couvrir les coûts de nos locaux comme le gouvernement le fait pour les CPE locataires, pour assurer la pérennité des garderies, qui sont aujourd’hui confrontées à de nombreux défis financiers et de main-d’œuvre.

Nous avons la chance de compter au Québec tant sur un réseau de garderies que de CPE, mais nous aurions tort de tenir les premières pour acquises. Le budget de la semaine prochaine doit donc être une occasion de rétablir une équité dans le financement de ces deux branches de notre réseau de la petite enfance. Essentiellement, il faut convertir davantage de places existantes en places subventionnées, et ajuster le financement afin de maintenir celles que nous avons présentement.

Marie-Christine Guay, vice-présidente du Rassemblement des garderies privées du Québec (RGPQ)

 Mario Ranallo, président du Rassemblement des garderies privées du Québec (RGPQ)

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