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Chronique historique

La Rive-Sud et la défense de Québec

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Sir Wilfrid Laurier à la conférence coloniale de 1902 (troisième à partir de la gauche de la première rangée). - Photo : Wikimedia Commons

11 sept. 2024 09:29

«La ville de Lévis est dans toute la force du mot une ville militaire.» Cette phrase publiée dans un éditorial du Quotidien de Lévis, du 15 avril 1908 a de quoi surprendre le lecteur d’aujourd’hui. Or, il s’agit de la réalité à ce moment.

Par Claude Genest

Par sa position géographique en face de Québec, le territoire lévisien est, à plusieurs époques, intimement lié à l’histoire militaire de la capitale. Que ce soit pour défendre ou pour attaquer la ville de Québec, les stratèges militaires ont dû au fil du temps tenir compte de la Rive-Sud. Ce positionnement stratégique est reconnu par Samuel de Champlain dès l’époque de la Nouvelle-France, mais des contraintes budgétaires ont empêché l’intégration de la Pointe-Lévy au système défensif de Québec.

Le champ étant libre, la valeur offensive de notre rive est mise à profit par les forces anglaises lors du siège de Québec à l’été de 1759. Plus tard, au 19e siècle, le gouvernement du Royaume-Uni fortifie massivement la Rive-Sud à l’aide de trois impressionnants forts face à la menace d’une invasion américaine en provenance du sud. Pour le Quotidien, «le gouvernement anglais qui s’était si bien servi de Lévis comme point d’attaque avait compris que, advenant une invasion, l’ennemi saurait s’en servir aussi, il résolut d’en faire une défense pour Québec. Les trois forts construits sur les hauteurs de Lévis ont rempli ce but», peut-on lire dans l’édition du 8 juillet 1879.

Telle est la situation en 1898 lorsque le gouvernement fédéral met sur pied un comité de réflexion, dont le mandat est d’étudier les problèmes reliés à la défense du territoire canadien. Présidé par le major-général Edward Leach, le groupe de travail conclut, entre autres choses, que la ville de Québec prête flanc à des navires ennemis remontant le fleuve Saint-Laurent.

Les choses en reste là, mais à l’occasion d’une conférence coloniale tenue à Londres en 1902, le premier ministre canadien, Sir Wilfrid Laurier (1841-1919), laisse entendre que le Canada est prêt à poser certains gestes en matière de défense. Il dit vrai, car deux ans plus tard, Ottawa commence à prendre en main graduellement les installations défensives britanniques d’Halifax, en Nouvelle-Écosse, et d’Esquimalt, en Colombie-Britannique.

Plus près de nous, le gouvernement fédéral achète discrètement en 1905 des terrains à la Pointe-de-la-Martinière en vue d’y construire des installations défensives dans le but de protéger Québec en cas de conflit. C’est dans ce contexte que débute la construction du Fort de la Martinière en 1907, à l’est de Lévis. Sensible aux questions de défense, le journal Le Quotidien écrit le 1er juillet 1907 à raison que «nos côtes de mers sont d’une longueur interminable. Comment empêcherions-nous les navires de guerre ennemis de les envahir?». La question est d’actualité alors que l’Allemagne est engagée dans une course à l’armement naval.

La menace d’un conflit majeur en Europe aidant, deux autres forts sont construits à l’est de Lévis, dont un deuxième à la pointe de la Martinière sur le bord du fleuve en 1910 suivie du fort de Beaumont lors du déclenchement de la Première Guerre mondiale en 1914. Avec six forts sur son territoire, Lévis est alors «dans toute la force du mot une ville militaire».

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