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Bien qu’officiellement fondé en 1899, l’histoire du 6e RAC remonte à 1855 où l’Acte de la Milice a été adopté en août de cette année permettant ainsi une alternative à la milice sédentaire de la Nouvelle-France dans laquelle les hommes devaient obligatoirement remplir des responsabilités militaires ponctuellement, selon les besoins et les circonstances. Avec cette nouvelle loi, c’est la création d’une milice volontaire qui a été effectuée et cette dernière prenait de plus en plus de place avec les années. Ainsi, le 31 août 1855, la première sous-unité, la batterie d’artillerie de Québec, est créée.
Comme le goulot d’étranglement du fleuve Saint-Laurent entre Lévis et Québec était un lieu fort stratégique à défendre, une batterie de garnison à Lévis a été mise sur pied en 1878 et elle s’entraînait avec des canons sur le site du fort Numéro-Deux de Lévis.
C’est en 1899 que différentes batteries d’artillerie de garnison de la région se sont regroupées pour créer le 6e RAC.
«C’est un moment charnière parce qu’une unité, comme le 6e RAC, c’était une organisation et une entité tant légale qu’organisationnelle autonome tandis qu’une sous-unité devait relever d’une organisation un petit peu plus grande», spécifie Richard Garon.
Ainsi, Georges Stanislas Vien en sera officiellement le fondateur, lui qui avait déjà occupé le poste de maire de Lauzon.
Fait à noter, le 6e RAC est la seule unité d’artillerie au Canada à avoir une insigne différente et une devise distincte et ce, depuis 1905. Ses armoiries sont inspirées de celles de la Ville de Lévis et sa devise du Chevalier de Lévis, François Gaston de Lévis.
Première Guerre mondiale
Si on disait que le goulot d’étranglement du fleuve Saint-Laurent était un endroit stratégique à défendre à l’époque, il l’était toujours lors de la Première Guerre mondiale en 1914 et le 6e RAC y jouera un rôle de guet. C’est la vision d’un bateau allemand sur le fleuve qui a sonné l’alarme pour le Canada. Ainsi, le régiment d’artillerie de campagne lévisien a été mobilisé afin de protéger le port de Québec et la voie navigable du Saint-Laurent via une garnison au Fort-de-la-Martinière. Cependant, aucune invasion n’aura lieu et la garnison n’aura pas eu à combattre.
Deuxième Guerre mondiale
À l’aube de la Deuxième Guerre mondiale, en 1939, le gouvernement canadien craint encore une fois une invasion de navires de surface sur le fleuve Saint-Laurent et demande de nouveau au 6e RAC de mobiliser une garnison au Fort-de-la-Martinière. Au fil de la guerre, plusieurs militaires viendront s’entraîner et se former au Fort-de-la-Martinière tandis que des membres du 6e RAC se déploieront ailleurs au pays, notamment à Halifax, en Gaspésie, en Nouvelle-Écosse et à Terre-Neuve.
Notons que le 6e RAC fournira des soldats au sein de l’artillerie antiaérienne. Même qu’une des batteries sera mobilisée en défense aérienne en Angleterre afin de protéger les Britanniques des dévastateurs raids allemands.
Aussi, la 58e batterie de Lévis sera mobilisée au sein du 4th Medium Regiment.
«C’était la seule unité d’artillerie francophone canadienne durant la Deuxième Guerre et elle a suivi tous les combats de la Normandie jusqu’à la libération des Pays-Bas et, entre autres, lors du combat de la poche de Falaise où les Alliés ont tenté d’encercler 400 000 soldats allemands», raconte l’historien.
Lors de ce combat, des Lévisiens étaient venus en aide à une unité polonaise dans un secteur où les Allemands tentaient de percer la défense. Quelques soldats lévisiens ont obtenu des médailles militaires polonaises importantes au cours de cette opération pour leurs actes de bravoure.
Guerre de Corée et bombe atomique
Alors que la Corée du Nord a envahi la Corée du Sud en 1950, la guerre de Corée éclate. Cette fois-ci, l’Organisation des Nations unies (ONU) met en place une coalition internationale pour rétablir l’ordre et repousser les forces armées de la Corée du Nord de la partie méridionale de la péninsule coréenne. Parmi les soldats déployés, un groupe brigade sera appuyé par la 58e batterie de Lévis.
Après cette décennie marquée par les conflits internationaux, l’ONU met en place une toute nouvelle dimension quant aux interventions militaires, c’est-à-dire les missions de la paix. Ainsi, afin de stabiliser ou rétablir l’ordre pacifiquement dans les pays en guerre, plusieurs réservistes, notamment du 6e RAC, à titre d’individu, décident de s’impliquer. Plusieurs membres du 6e RAC ont pris part à ces missions, au Vietnam et au Moyen-Orient, par exemple, où ils occupaient des rôles logistiques.
De 1995 et jusqu’en 2010, les missions de la paix deviennent plutôt des missions d’«imposition» de la paix où l’utilisation de la force sera nécessaire. Alors, le 6e RAC contribuera également lors d’intervention en Bosnie et à plusieurs reprises en Afghanistan.
À ce jour
C’est en 1999, lors des célébrations du 100e anniversaire du 6e RAC, qu’une parade est organisée au parc de la Paix dans le secteur Lauzon et qu’on lance ce qui deviendra une tradition, c’est-à-dire, le Concert au crépuscule où le gouverneur général du Canada, Roméo Leblanc, est invité à titre d’invité d’honneur.
Pour ce 100e anniversaire, on y a même érigé un monument au parc de la Paix, ce dernier était l’ancien monument funéraire de la famille Vien. Tout près de ce monument, on y retrouve un cénotaphe entouré de quatre canons antichars qui appartenaient au 35e régiment antichar du 6e RAC, dont le manège militaire était situé tout en bas du mont Lauzon, qui est désormais un garage municipal.
Ainsi, ces riches 125 années d’histoire démontrent la polyvalence et l’importance que les Lévisiens et le 6e RAC ont pu jouer dans l’histoire militaire nationale et internationale, croit Richard Garon.
«L’impact du 6e RAC est peut-être intangible et discret, mais il a eu un impact sur la qualité opérationnelle des Forces armées canadiennes en opération autant à l’international qu’au pays», conclut-il en ajoutant que contrairement à Québec, qui a été une ville garnison depuis sa création, Lévis a toujours été défendue par ses citoyens-soldats, dont les miliciens du 6e RAC.